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Le Cantique des Cantiques


Le Cantique des Cantiques

St Bernard, dans son sermon 79 sur le Cantique, au 12ème Siècle, disait : « dans ce chant nuptial qu’est le Cantique des Cantiques, c’est l’amour qui s’exprime partout. Et si l’on désire parvenir à la compréhension de ce que l’on peut y lire, il faut aimer. Sinon, c’est en vain qu’on écoute ou qu’on lit ce poème d’amour : sans amour, on n’arrive à rien ; un cœur froid ne peut rien saisir de cette parole de feu ». En entendant St Bernard, on comprend mieux l’intuition des cœurs de personnes qui s’aiment sincèrement, quand ils choisissent ce texte ! Oui, cette ode à l’amour résonne fortement dans leur chemin d’union, de don mutuel d’amour. Le Cantique des Cantiques possède un titre étonnant : c’est le seul titre de toute la Bible qui est un superlatif. On dirait aujourd’hui, parmi toutes les chansons du Hit Parade, c’est « le Chant des chants », le titre du siècle, la chanson à jamais préférée des français et de toute l’humanité ! Comme si la Bible nous disait que le meilleur « tube » pour chaque personne humaine, le sang qui nous fait vivre et vibrer nos cœurs, c’est l’amour ! Le Cantique ne parle par uniquement d’amour : il chante l’amour ! Il est l’amour jaillissant en parole incandescente. Oui, ce chant d’amour entre un homme et une femme est universel et il fait parti du patrimoine de l’Humanité qui a inspiré tant la littérature et les arts, de Victor Hugo à Claudel, en passant par Chagall ! Pourtant, son origine demeure une énigme : pour certains, ce texte s’inspire de la littérature païenne, en particulier des chants d’amour de l’Egypte ancienne, très populaires à l’époque du roi Salomon. Pour d’autres, son origine est strictement biblique car il puise dans les Livres d’Osée ou d’Isaïe. Il est aussi possible que le matériel initial a été emprunté aux païens, mais retravaillé pour s’inscrire dans l’expérience d’Israël. Sa rédaction finale remonte vers le 5ème S avant Jésus-Christ où le livre a été placé sous la signature du roi Salomon. Certains pensent que l’auteur est une femme. Quoiqu’il en soit, une chose est sûre : dans ce dialogue, homme et femme sont à parité. Et il est malaisé de savoir à qui, du bien-aimé ou de la bien-aimée, il faut attribuer certains versets comme « n’éveillez pas, ne réveillez pas l’amour » (Ct 2,7). Une des particularités, par rapport aux autres chants bibliques, c’est que ce texte ne parle pas de Dieu (à part une petite évocation en Ct 8,6 à un coup de foudre divin) et qu’il n’est pas inscrit, comme tous les autres textes de la Bible, dans la trame de l’histoire biblique. On pourrait penser qu’il a été posé là gratuitement ; à l’image de l’amour qui est offert et reçu gratuitement ! C’est un dialogue intime et vivant qui fait intervenir deux voix, un homme et une femme, un « Je » et un « Tu », dans une célébration mutuelle, une parité harmonieuse dans les senteurs de l’Orient, sans que l’on ne connaisse leur identité ni s’ils sont époux. Le Cantique célèbre l’union de deux amoureux qui s’émerveillent de la beauté de leurs corps. C’est un chant d’amour qui s’attache seulement à la beauté physique, sans jamais parler ni de Dieu ni de procréation. Très tôt, le Cantique a connu une double destinée : d’abord un poème d’amour prisé du monde profane, que l’on continue de chanter aujourd’hui en faisant les vendanges en Israël ; mais aussi un texte mystique interprété comme une parabole de l’Alliance entre Dieu et son Epouse (Israël, dans la tradition juive ; le Christ et l’Eglise, Dieu et chaque croyant dans la tradition chrétienne). Et les interprétations de chacun oscillent entre ces deux pôles : l’un se focalise sur la description de l’amour humain en s’en tenant qu’à ce qui concerne l’humain ; l’autre considère que cette relation a d’emblée une signification religieuse en référence à Dieu et son peuple. D’Origène à St François de Sales, la Tradition chrétienne l’a lu de manière allégorique, comme le chant par excellence de l’expérience intime de Dieu. Au 4ème et 5ème siècles, il est utilisé dans les catéchèses baptismales. Puis il sera peu à peu réservé à la vie monastique et à la vie mystique : St Bernard, St Jean de la Croix, Ste Thérèse d’Avila… Et depuis ce temps jusqu’à nos jours, ce Cantique est très peu présent dans la Liturgie, si ce n’est pour les mariages, d’où l’intérêt d’évoquer ces quelques remarques en cette période estivale. Cette parole incandescente aux paroles érotiques assumées nous enlève toute culpabilité : elle nous dit que la Parole de Dieu accueille la relation amoureuse sans aucune réticence. Au contraire, elle la considère comme belle et bonne. Nous avons aussi des métaphores invoquant des animaux fuyants (renards et biches) : cette manière dont le Cantique évoque la relation amoureuse en ménageant constamment une expérience de la perte (les deux personnages s’appellent, s’attendent, se désirent, se rencontrent, se perdent) est très moderne. L’amour vrai comporte l’expérience de la distance, de l’esquive car toute rencontre débouche sur une expérience de l’autre qui demeure autre. Ce texte s’inscrit en faux contre tous les rêves d’amour fusionnel. Le désir est relancé constamment à travers cette expérience de la perte, du manque, de l’attente. Et ce qui vaut pour l’humaine, vaut aussi dans la vie spirituelle dans notre relation à Dieu : sans désir, sans manque, sans attente, nous serions comme des repus spirituels et non plus en chemin ! Soyons comme l’amoureux du Cantique : bondissons montagnes et collines de nos Causses et Vallées par amour et désir de notre Seigneur Jésus Christ !

+Franz à partir d’un texte de Dominique Filloux

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